Se trompent lourdement tous ceux qui croient pouvoir juguler les flux migratoires vers l¹Europe par la simple installation d¹artifices de dissuasion aux frontières. Ni clôtures, ni murs, ni tranchées aussi sophistiqués soient-ils ne pourront venir à bout de la tendance naturelle de l¹être humain à aller à la recherche d¹une vie meilleure et des richesses, là où elles se trouvent. Cela est si vrai qu¹à travers toute l¹Histoire de l¹humanité, les frontières n¹ont jamais constitué une barrière infranchissable, mais plutôt un lieu d¹échanges et de passage des hommes et des biens.
Et c¹est en vertu du phénomène bien connu de l¹osmose qui tend à créer une situation d¹équilibre entre deux solutions séparées par une membrane que l¹être humain migre vers les contrées, même lointaines, pour prendre sa part des richesses accumulées ailleurs, dès lors qu¹il ne peut en disposer chez lui. C¹est à ce titre que les pays d¹Europe avaient envahi l¹Amérique, puis l¹Asie et l¹Afrique durant les siècles passés, à ceci près que ces opérations ont été menées par les Etats eux-mêmes et visaient à s¹accaparer des richesses naturelles des pays en usant au besoin de violence, voire de massacres comme ce fut le cas à l¹encontre des Indiens d¹Amérique et des populations d¹Afrique noire.
Tant que le déséquilibre flagrant persiste entre le Nord et le Sud et que les puissances occidentales qui dominent l¹économie mondiale, en vertu de mécanismes qui visent à appauvrir les pays du Sud pour enrichir davantage ceux du Nord, il faut s¹attendre à ce que l¹immigration du Sud vers le Nord s¹intensifie en s¹adaptant à toutes les entraves qui peuvent être mises sur son chemin. Ce phénomène de migration n¹est d¹ailleurs pas uniquement trans-national, mais existe bel et bien au sein de tous les pays du monde, les populations se déplaçant des régions pauvres vers les régions riches, sans que quiconque y trouve à redire. Voilà pourquoi il importe que notre pays, qui a toujours été un carrefour de peuplement, un creuset de brassage de civilisations et un lieu de passage nord-sud et est-ouest joue un rôle essentiel dans la prise de conscience par ses voisins et ses partenaires d¹Europe et d¹Afrique de la nécessité d¹agir en profondeur dans le traitement de la question migratoire.
Et d¹abord en évitant de culpabiliser les migrants qui ne sont ni des criminels, ni des voleurs, mais de les prendre pour ce qu¹ils sont : des êtres humains en détresse, à la recherche d¹une vie digne, qui méritent respect et soutien pour leur permettre de se sortir de griffes des réseaux de trafiquants d¹immigration clandestine qui s¹enrichissent à leurs dépens. Or, c¹est contre ces réseaux là que doit s¹attaquer la répression pour les empêcher de s¹enrichir sur le dos des candidats à l¹émigration clandestine, sachant que leurs «chefs» ont, le plus souvent, pignon sur rue et ne sont pas inquiétés par les services de police et de la gendarmerie dès lors qu¹ils sont prêts à corrompre les agents véreux qui pullulent.
Toujours est-il que la solution réelle à la question de l¹immigration clandestine passe par la réduction des disparités entre le Nord et le Sud à travers une politique de co-développement permettant aux pays anciennement colonisés de s¹insérer dans l¹économie mondiale, dans le cadre d¹échanges équilibrés et avantageux pour les uns et les autres.
Force est de constater, malheureusement, que tel n¹est pas encore l¹état d¹esprit qui prédomine dans le monde occidental où l¹on continue à pratiquer, d¹une manière détournée et douce, l¹exploitation coloniale.