La nicotine, qui passait jusque-là pour une substance non cancérigène est désormais mise à nu. Une équipe américaine a découvert son implication dans l¹accélération de la croissance des tumeurs du poumon «déjà installées».
Le Pr Srikumar Chellappan et ses collègues de la South Florida University, ont décelé la présence dans notre organisme de récepteurs de la nicotine, les nAChRs pour nicotinic acetylcholine receptors. Ces derniers, fixés sur les cellules pulmonaires cancéreuses, seraient «la clé employée par la nicotine pour accélérer la prolifération des tumeurs».
Ce «coup de pouce» totalement ignoré jusqu¹alors, confère à la nicotine un statut de «cancérophile» plutôt unique en son genre. Une mauvaise nouvelle qui vient s¹ajouter à la liste déjà bien longue des méfaits du tabagisme, responsable chaque année de 5 millions de morts.
Pendant ce temps, la revue médicale «The Lancet», qui paraissait il ya une semaine, a publié un article montrant que fumer peut tripler le risque de crise cardiaque, l¹exposition au tabac sous toutes ses formes étant également mauvaise pour le coeur. Le surcroit de risque diminue après l¹arrêt du tabac, selon l¹étude Interheart, portant sur plus de 27000 personnes de 52 pays (12461 ayant survécu à un infarctus et 14637 servant de groupe de contrôle).Parmi les «petits fumeurs» (moins de dix cigarettes par jour), l¹excès de risque disparaît trois à cinq ans après l¹arrêt du tabac. Mais pour les plus gros fumeurs, un excès de risque résiduel (environ 22pc) subsiste vingt ans après l¹arrêt du tabac.
Le risque d¹infarctus augmente de 63pc pour les personnes fumant actuellement moins de dix cigarettes par jour, il est multiplié par 2,6 pour celles consommant de 10 à 19 cigarettes quotidiennes et par 4,6 pour 20 cigarettes et plus.
L¹exposition à la fumée des autres (tabagisme passif) accroît le risque de crise cardiaque de 62pc si cette exposition dépasse 21 heures par semaine.
Ces révélations scientifiques interviennent quelques jours après qu¹une juge fédérale américaine a reconnu que les géants américains du tabac avaient cherché pendant des décennies à dissimuler les risques de la cigarette mais n¹a pas infligé de lourde amende au secteur.
«Fumer des cigarettes provoque des maladies, des souffrances et des décès. En toute connaissance de cause, les accusés ont publiquement démenti, déformé et minimisé les risques du tabac depuis des décennies», disent, en substance, les attendus d¹un jugement long de… 1653 pages. La juge Gladys Kessler a ordonné aux cigarettiers de publier des «déclarations correctives» dans les journaux et sur leurs sites Internet à propos des risques sur la santé et de l¹addiction causée par la cigarette et la nicotine. Elle a notamment interdit aux cigarettiers, à dater du premier janvier 2007, d¹apposer la mention «légères» sur les paquets de cigarettes. L¹adoption d¹un programme national d¹aide à l¹arrêt de la consommation de tabac, comme le souhaite le gouvernement, «servirait incontestablement l¹intérêt public», a estimé la juge, mais elle a déclaré qu¹elle ne pouvait agir sur ce point en raison d¹une jurisprudence disant que les soins doivent être antérieurs et ne pas constituer de pénalités pour les actions passées. Le gouvernement avait demandé à la juge de forcer les cigarettiers à financer à hauteur de 10 milliards de dollars un programme pour aider la population à arrêter de fumer. Au cours du procès, le gouvernement a appelé à la barre des scientifiques, des économistes et des experts du secteur du tabac. Selon eux, les géants du tabac ont mené, des décennies durant, une campagne visant à nier ou à minimiser les risques du tabagisme. Les accusés ont fait défiler leurs propres scientifiques et économistes ainsi que les patrons des groupes du secteur. Ils ont démenti tout complot visant à promouvoir la cigarette et ont refusé tout fondement aux poursuites, arguant qu¹ils avaient modifié en profondeur leurs pratiques marketing dans le cadre d¹un accord à l¹amiable conclu en 1998 avec plusieurs Etats.
Vendredi, le cigarettier Philip Morris et sa maison mère Altria ont annoncé qu¹ils allaient demander une révision du jugement. «Philip Morris USA et le groupe Altria considèrent que l¹essentiel de la décision ne trouve pas appui dans la loi et dans les preuves présentées au procès et paraissent (…) enfreindre le droit exclusif du Congrès à déterminer la réglementation des produits liés au tabac», a déclaré William S. Ohlemeyer, vice-président d¹Altria.